Quoi de plus tentant que de réduire votre temps de travail, et en conséquence votre salaire, lorsque votre entreprise perd un à un ses partenaires commerciaux qui sont eux même dans la “panade” ?

Après tout, il en est de la survie de votre entreprise n’est ce pas ? Et quel salarié digne de ce nom, préfèrerait rester chez lui plutôt que d’accepter des modifications de son contrat ?

S’il est tentant de crier au loup, attardons nous plutôt sur les principes qui régissent la modification des clauses du contrat, le Code du travail étant passé par là.

 

Mon patron peut-il modifier mon contrat de travail ?

Oui, cette arme est mise à la disposition de l’employeur qui bien souvent n’hésitera pas à faire jouer sa position de force. Il faudra cependant distinguer les modifications qui peuvent apparaître comme étant essentielles, auxquelles cas il y aura des règles à respecter,  de celles qui ne sont que secondaires ou indifférentes.

Toutes les modifications du contrat ne sont pas substantielles, autrement dit comme portant atteinte directement à une des raisons pour laquelle le salarié a porté sa signature sur le contrat et à l’essence même du contrat.

Parmi les modifications indifférentes, notons qu’il est permis à l’employeur de procéder à une simple mutation d’un poste à un autre à l’intérieur de l’entreprise avec conservation de la classification professionnelle, ou encore de modifier l’horaire de travail dans un besoin légitime de l’entreprise, surtout si cette possibilité était prévu dans le contrat. Dans ces cas, il n’y a pas de règles spéciales à respecter. L’employeur procède à la modification et le salarié, ne lui en déplaise, est contraint d’accepter sauf à démissionner.

Sera par contre considéré comme modification substantielle un changement d’horaire lorsque l’horaire de travail est un élément essentiel de la vie privée du salarié, mais aussi et surtout une baisse de la rémunération.

Notons enfin que l’employeur ne peut prévoir dans un contrat de travail que le salarié devra accepter n’importe quelle modification de son contrat de travail. Une pareille clause sera déclarée abusive.

Quels sont mes droits de salarié en cas de modification substantielle ?

Le Code du travail nous dit expressément que toute modification en défaveur du salarié portant sur une clause essentielle du contrat de travail doit, à peine de nullité, être notifiée au salarié dans les formes et délais prévus pour le licenciement avec préavis, et indiquer la date à laquelle elle sort ses effets.
Le salarié peut demander à l’employeur les motifs de la modification et l’employeur est tenu d’énoncer ces motifs dans les formes et délais prévus pour la motivation du licenciement avec préavis.

La modification immédiate pour faute grave doit être notifiée au salarié, sous peine de nullité, dans les formes et délais applicables au licenciement pour faute grave.

Le salarié aura alors le choix entre accepter cette modification essentielle si elle lui paraît justifiée ou la refuser en résiliant son contrat pour faute grave de son employeur.

Par une fiction de la loi, le législateur, assimile  a posteriori la résiliation du contrat de travail à un licenciement susceptible d’un recours judiciaire. C’est ici que réside tout l’intérêt de la distinction entre modifications substantielles et modifications indifférentes.

Que se passe –t-il si mon employeur ne respecte pas les formes du licenciement ?

Si le patron opère une modification substantielle en défaveur du salarié sans observation de la procédure, cette opération sera considérée comme nulle par la jurisprudence.

Le salarié peut en effet demander au juge la nullité de la procédure sans agir pour licenciement abusif s’il n’a pas résilié son contrat.

Ainsi, la nullité n’engendre pas par elle-même une rupture automatique du contrat de travail, à moins encore une fois que le salarié ne notifie à son employeur la résiliation ouvrant droit à un recours judiciaire pour licenciement abusif.

La nullité de la modification contractuelle n’a d’autre conséquence qu’elle celle qu’elle ne fait pas perdre au salarié les avantages de son contrat antérieur.

Par exemple, s’il y a eu baisse de salaire et que le salarié continue à travailler au sein de l’entreprise avec un salaire moindre, ce dernier pourra réclamer au juge en plus de la nullité de la modification,  la différence de salaire non perçue (conséquence immédiate de la nullité).

Ajoutons que le simple fait de continuer à travailler au sein de l’entreprise ne signifie pas pour autant que l’on marque son accord tacite avec la modification opérée du contrat de travail.

Maître David GIABBANI
Avocat à la Cour
Barreau de Luxembourg
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www.maitregiabbani.com

Pour aller plus loin : art. L. 121-7, L. 124-2, L. 124-3, L. 124-5, L. 124-10 et L. 124-11 du Code de travail.