Tendre la main et demander une pièce peut-il être interdit au Grand-Duché ? Pour la ministre de l’Intérieur, Taina Bofferding, la réponse est non. Reste à savoir si la bourgmestre de Luxembourg-ville, Lydie Polfer, va s’en tenir à cette réponse.

En effet, en mars dernier, la bourgmestre de la capitale avait fait savoir son intention de proscrire tout acte de mendicité des rues de Luxembourg-ville. Enfin, tel qu’imaginée par la majorité DP-CSV du conseil communal, la mesure aurait pu s’appliquer en priorité à certaines heures (entre 7h et 22h) et en certains lieux (le quartier Gare et la Ville-Haute).

Mais même “ciblée”, pareille décision apparaît illégale aux yeux du ministère de l’Intérieur. En effet, les nécessiteux présents en Ville ne constituent pas un danger pour le grand-public lorsqu’ils demandent un peu d’argent. Donc il n’y aurait pas lieu de modifier le règlement de police si l’on s’en tient à ce cadre légal.

La bourgmestre réagit

Si la ministre Taina Bofferding a clairement fait savoir que « l’interdiction de la mendicité dans la capitale ne peut pas entrer en vigueur », elle a toutefois rappelé que la mendicité agressive était, elle, répréhensible selon le Code pénal luxembourgeois. « Il ne s’agit pas de savoir si je considère ces réglementations comme une bonne ou une mauvaise décision. Le rôle du ministère de l’Intérieur est de contrôler légalement la réglementation », a poursuivi la ministre socialiste.

La décision du gouvernement s’appuie également sur une récente décision de la Cour européenne des Droits de l’Homme. La juridiction, dans l’affaire Lacatus, avait réfuté toute possibilité d’interdire la mendicité sur le domaine public, expliquant qu’un individu avait toute légitimité pour “exprimer son besoin et tenter d’y remédier par le moyen de la mendicité”.

Reste à voir comment la bourgmestre et son conseil réagiront à cette prise de position. L’annonce de cette possible interdiction avait déjà suscité des crispations au sein des élus et des asbl en charge des questions sociales. Mais alors que la campagne pour les élections communales vient de débuter,  la bouillonnante Lydie Polfer ne pouvait pas en rester là.

L’élue a immédiatement réagi, informant que la Ville allait mandater un avocat pour étudier les suites à donner. En effet, la commune dispose de trois mois pour contester l’avis gouvernemental auprès du Tribunal administratif.

Selon la bourgmestre, son projet « n’est pas de virer des gens qui mendient et connaissent une mauvaise passe dans leur vie ». Par contre, elle continue à pointer du doigt un vrai problème de “traite organisé d’êtres humains” se cachant derrière la question de la mendicité. « On a même vu des enfants quémander dans nos rues  », s’émeut-elle.

Au Grand-Duché, les communes de Diekirch, Ettelbrück ou Dudelange disposent également d’un règlement de police ferme sur la mendicité. Taina Bofferding a assuré que ces trois villes recevraient prochainement des directives leur rappelant ce qui peut être fait en la matière.

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