🚬 Et si on taxait un peu plus tabac et cigarettes ? 🇱🇺
Publié
par
Patrick Jacquemot
le 27/11/2024 à 06:11
Cela fera partie des “traditionnelles” augmentations du 1er janvier. Au passage en 2025, comme la taxe carbone sur le plein de carburants, le Luxembourg réhaussera ses accises sur pots de tabac à rouler, cigares et cigarettes. Une hausse confirmée en octobre dernier par Gilles Roth. Un ministre des Finances qui, subitement, se muait en ministre de la Santé pour motiver ce choix : un prix plus élevé devant pousser les habitués a cessé de fumer…
Mais si déjà on peut douter du réel recul de la consommation du seul fait de cette mesure, voilà maintenant la Cour des comptes qui vient critiquer cette orientation. En effet, à l’heure de donner leur avis sur le budget 2025 de l’État, les sages expriment des doutes. Pas sur l’effet de la mesure sur les rentrées fiscales mais sur le bien-fondé sanitaire…
Les calculs sur ce que pourraient rapporter les diverses taxes et accises sur le tabac ne sont pas remis en cause (1,2 milliard d’euros) mais la Cour retoque l’argumentaire du ministre mué en docteur : les recettes espérées sont bien trop modestes. En tout cas si l’effet recherché était effectivement d’améliorer la santé publique, et atteindre cette fameuse “génération sans tabac” d’ici 2040.
Et le commentaire des experts ès finances publiques est cinglant : « Cette augmentation relève davantage d’une initiative ponctuelle que d’une stratégie cohérente et intégrée visant à atteindre des objectifs mesurables à moyen terme dans la lutte contre le tabagisme ». Une petite claque.
La perspective néerlandaise ou australienne
Si le Grand-Duché voulait véritablement suivre cette voie, ce n’est pas de 30 centimes qu’il faut augmenter les prix (hausse estimée pour le paquet de 20 unités le moins cher) mais bien plus. Et la Cour de suggérer l’exemple des Pays-Bas qui envisagent de monter le prix d’un paquet à 47 euros en 2040 ! Avec des hausses de près de +2 € par an pour tenir cet échéancier.
Des pays comme l’Australie ont déjà adopté cet effet répulsif du prix (20 € le paquet) pour motiver les consommateurs à se passer de cigarettes, tout en réalisant suffisamment de recettes dans les caisses publiques pour assurer la –coûteuse- prise en charge des malades du tabac.
Par ailleurs, la Cour des comptes estime que le pays doit se chercher des sources de revenus pérennes. Et les taxes sur le tabac sont viables sur le long terme.
D’aucuns évoquent aussi une certaine hypocrisie dans la hausse annoncée du prix des cigarettes et autres au Grand-Duché. Prétexte étant aussi donné par Gilles Roth que le Luxembourg doit s’aligner sur les tarifs de ses voisins. Même au 1er janvier, le tabac restera plus que compétitif au pays que chez ses voisins frontaliers, et comme le “tourisme à la pompe” existe pour essence et diesel, les aller-retours des fumeurs vers les points de vente de tabac ne devraient guère ralentir avec un écart toujours proche des 5 €/paquet !
Bref autant ne pas se mentir. Primo, malgré l’augmentation des prix, jamais le Luxembourg n’a autant vendu de produits du tabac (4,4 milliards de cigarettes en 2023 + 6.158 tonnes de tabac à rouler). Secundo, la consommation nationale ne décroit pas. Le récent Panorama de la santé en témoignait encore. Tertio, il n’y a pas à rougir à prendre les fumeurs pour des vaches à lait fiscales !
Possible mais pas obligatoire
Si le gouvernement maintiendra sa hausse annoncée des accises sur le tabac, aucune marque n’a l’obligation d’augmenter ses prix de vente pour la répercuter à ses clients au Luxembourg. Mais quel manufacturier acceptera de rogner sur ses marges pour maintenir ses prix stables à l’heure du passage à 2025. Certainement aucun…
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