Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les allocations familiales au Luxembourg du 1er août 2016, les enfants non biologiques des travailleurs frontaliers, se sont vus supprimer les prestations familiales.

Nous avons largement écrit sur ce sujet où nous résumions la situation dans cet article : Les allocations familiales des familles recomposées au Luxembourg : toute une histoire !

Le Conseil supérieur de la sécurité sociale, dans un arrêt du 17 décembre 2018 avait saisi la Cour de Justice européenne, qui dans son arrêt du 2 avril 2020 avait donné gain de cause aux frontaliers, en déclarant illégale la loi luxembourgeoise de 2016. En effet, cette loi était jugée discriminatoire par rapport aux enfants des résidents, qui eux se voyaient conserver le droit aux allocations familiales, même s’il s’agissait d’un enfant non biologique.

Malheureusement, le Conseil supérieur de la sécurité sociale a ajouté une clause à l’octroi des allocations, à savoir : le travailleur frontalier ayant dans son foyer un enfant issu d’une autre union (donc considéré comme non-biologique), doit prouver qu’il subvient à 100% aux besoins de l’enfant. En résumé, si par exemple, le parent verse une pension alimentaire pour l’enfant, quel que soit le montant, ce dernier ne recevra plus d’allocations, et ce, même si le travailleur frontalier pourvoit aux besoins essentiels de l’enfant (logement, nourriture, frais scolaires etc).

Que dit cette nouvelle loi ?

La Chambre des députés a adopté hier, le projet de loi 7828 qui vise principalement à assurer la conformité du droit positif luxembourgeois avec la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, plus précisément les arrêts C-802/18 et C-129/20 des 2 avril 2020 et 25 février 2021, respectivement.

Extrait : « Sont encore considérés comme membres de famille, les enfants du conjoint ou du partenaire au sens de la loi modifiée du 9 juillet 2004 relative aux effets légaux de certains partenariats pour lesquels la personne visée à l’article 269, paragraphe 1er, alinéa 2, lettre b), pourvoit à l’entretien et avec lesquels cette personne partage, avec son conjoint ou partenaire, légalement un domicile commun et une résidence effective et continue. La preuve de ces conditions peut être rapportée par tous moyens. ».

Le décryptage et la crainte de Maître Pascal Peuvrel

Pascal Peuvrel, avocat à la cour et à l’origine de l’affaire pilote concernant la discrimination que subissent les enfants des frontaliers nous livre ses remarques : « La nouvelle loi ne fait que légaliser la pratique actuelle. Elle intègre notamment la notion de pourvoi à l’entretien mais sans le définir. La CAE (Caisse pour l’Avenir des Enfants) va finalement continuer à appliquer ce qu’elle fait déjà à savoir demander la situation des parents biologiques, s’il y a une pension alimentaire mais sans se préoccuper à savoir si le beau-parent pourvoit à l’entretien.

Cette nouvelle loi ne règle pas non plus la question de la discrimination entre résident et non résident alors que les résidents qui se trouveront dans la même situation bénéficieront des allocations ».

Sa crainte est que la CAE continue de demander au parent frontalier, non biologique, d’apporter la preuve qu’il pourvoit bien à l’entretien de l’enfant, avec de nombreuses pièces justificatives. Ce qui n’est pas le cas pour les enfants résidents au Luxembourg !

Calculez vos allocations familiales.