Résidente luxembourgeoise, Magalie* soufflera ses 40 ans bougies cette année. Elle a su démontrer ses compétences dans la consultance financière et son parcours l’aura vu être déjà plusieurs fois maman. Sauf qu’à l’approche de la 3e naissance en 2021, ce qui s’annonçait encore comme “le plus beau jour de sa vie” s’est transformé en un casse-tête administratif. Un différend avec la Caisse nationale de santé (CNS) sur lequel se penche désormais la Cour constitutionnelle du Luxembourg…

En effet, après un début de carrière professionnelle au Grand-Duché, avec tout ce qu’il faut d’ affiliations en règle, de cotisations ou d’impositions réglées, la jeune femme s’est vue refuser les indemnités liées à son dernier congé maternité. Médicalement, Magalie pouvait quitter son poste. Mais pas question pour la CNS de lui verser un sous.

La Caisse a bien entendu motivé son rejet de la demande de la future maman, s’appuyant sur l’article 25 de son Code. Le texte précise que, comme salariée, Magalie aurait dû cotiser pendant 180 jours consécutivement à la Sécurité sociale. Et ce n’était effectivement pas le cas.

Égalité ou pas ?

En effet, après une quinzaine d’année de carrière, la résidente avait été 8 mois au chômage (indemnisée par l’Adem). Elle avait retrouvé un emploi depuis… 172 jours. « Et ce qui nous heurte, ce n’est pas tant que la Caisse applique cet article. Mais c’est qu’en plus d’être injuste, il bafoue un principe d’égalité de traitement entre citoyens que la Constitution du pays a gravé dans ses textes ! Même au chômage, on cotise à la CNS et subitement cela ne vaudrait rien», tonne son défenseur, Me Mbonyumutwa.

Car après s’être ouverte de sa situation auprès de l’ALEBA, le syndicat a immédiatement transmis le dossier auprès d’un avocat luxembourgeois. « Notre 1ère opposition auprès de la CNS a été rejetée. Mais la suite donnée au recours déposé auprès du Conseil arbitral de la Sécurité sociale nous ouvre plus d’espoirs. » En effet, le juge a été embarrassé, troublé par les arguments soulevés.

Aussi décision a été prise de poser deux questions préjudicielles à la Cour constitutionnelle. C’est en effet le seul organe pouvant trancher le litige sur l’adéquation entre ce que dit l’article pointé et ce qui est écrit dans Constitution. « Selon nous, cet article ne va pas dans le sens d’égalité de toutes les femmes enceintes devant la loi. Pourquoi, même si j’ai continué à cotiser pendant mon chômage, la Caisse dicte-t-elle que cela compte pour rien. Les six mois de cotisation à la CNS avant sa maternité, ma cliente les a largement… »

Depuis mi-août, la Cour constitutionnelle dispose des argumentaires des deux parties. Maintenant, l’instruction pourrait prendre des semaines, voire des mois. Mais Me Mbonyumutwa sait que la cause justifiera un peu de patience… « Si la Cour constate qu’il y a bien  discrimination injustifiée entre les femmes affiliées en tant que chômeuses indemnisées et les femmes affiliées en tant que travailleuses et qu’elle déclare l’article 25 contraire à la Constitution, le refus opposé à notre cliente n’aura plus de base légale ».

Autrement dit, même avec trois ans de retard (!) Magalie pourra bénéficier de son indemnité pécuniaire de maternité. Et ce qui est vrai pour elle, le serait alors pour toutes les mamans ayant connu une période de chômage et qui n’ont pu disposer de cet argent sur la durée de leur congé maternité. Et là, ça va en faire sans doute des mères de famille (frontalières comme résidentes) à dédommager… 

 

  • * Magalie est un prénom fictif