Six mois que Marc Lebrun a pris la tête de la FES, fédération regroupant les principaux acteurs de l’intérim du Grand-Duché. « Il faut d’ailleurs avoir conscience qu’il s’agit là d’un secteur d’activité où la concurrence est forte. Pour un “petit” pays comme le Luxembourg, on compte 58 entités travaillant sur ce créneau. Et notre Fédération en rassemble 31, qui pèsent pour 75 % du chiffre d’affaire réalisé… », indique le professionnel.

Justement, ce chiffre d’affaires, il baisse. Pour ne pas dire qu’il a plongé même… « La raison est simple : nous sommes un baromètre ultra-sensible du niveau d’activité du pays. Quand les entreprises ont des commandes, elles ont besoin de main d’œuvre supplémentaire et font appel à nous. Dans le cas contraire, avant de se séparer de leurs propres personnels, c’est le nombre d’intérimaires qui va d’abor être réduit… »

Et si aujourd’hui quelque 10.500 intérimaires sont sous contrat, on est loin des niveaux atteints d’il y a cinq ans encore. Même si cela représente 1,3 million d’heures prestées/mois. Le Covid, l’impact du conflit en Ukraine et la crise énergétique sont passés par là. « Quand sur un an, le BTP se sépare de près de 3.000 de ses employés, on oublie de compter les intérims restés sur le carreau. Sur ce seul secteur, on a bien perdu 40% d’activité de notre côté ! ».

Pas une voie sans issue

Globalement, depuis l’été, les membres de la FES ont ressenti une « légère reprise ». Pas forcément à hauteur des prévisions statistiques, ni dans les secteurs généralement “gros clients” (construction, industrie et service) mais plutôt dans l’hôtellerie-restauration, la logistique ou le secteur médical.

À l’heure de célébrer les 30 ans de la Fédération Employement Services, Marc Lebrun veut voir le verre à moitié plein : « En 2009, en 2015, durant l’épidémie corona, maintenant, chaque crise a toujours accéléré les mutations dans notre activité; on va encore s’en sortir !»

Déjà, la digitalisation du quotidien des agences d’intérim leur ont permis de se montrer plus réactives par rapport aux besoins de leurs clients, comme dans le contact avec les salarié-e-s possiblement intéressé-e-s par une proposition de mission. Et puis, la Fédération s’est lancée à la rencontre des candidats. « Sept Jobdays en deux ans alors que nous n’en avions jamais organisés, cela témoigne clairement de notre volonté de conserver un portefeuille de CV toujours plus volumineux, et surtout avec des profils de plus en plus variés. »

Car à l'heure où de nombreuses sociétés reconnaissent avoir des difficultés à recruter, et où l'État doit faciliter les conditions d'accès à des candidats venus de pays tiers sur des emplois en tension, les agences d'intérim savent qu'il leur reste des marges de marché à occuper. « Nous représentons moins de 2 % des jobs aujourd'hui, mais nos candidats pourraient être bien plus présents encore », assure le président.

Et Marc Lebrun de démonter quelques a priori tenaces. Mal aimé l'intérim ? « Nous avons réalisé une enquête, 80% de nos intérimaires recommanderaient cette forme de contrat à un proche... » Voie sans issue l'intérim ? « 4 intérimaires sur 10 finissent par trouver une situation pérenne chez leur employeur du moment. » Mal payées les missions ? « La rémunération est garantie compris avec les "primes" de fin mission. Ce qui, au vu des niveaux de salaires luxembourgeois, peut être attractif pour nos candidats qui, à 70%, sont frontaliers.»

« L'intérim n'est pas secondaire »

Cependant, depuis quelques temps, un caillou fiscal est venu se glisser dans la chaussure des sociétés intérimaires. En effet, le fisc luxembourgeoise s'est avéré quelque peu débordé par le nombre de dossiers d'entrants-sortants en intérim. Un volume de paperasses à analyser réduit d'un geste : « Choix a été fait d'imposer une carte d'impôt avec un taux de prélèvement unique de 10% pour tout le monde intérimaire, sans tenir compte du salaire ou de la situation familiale. Évidemment, c'est plus simple à gérer pour l'administration mais cela ne fait pas forcément les affaires de certains de nos candidats placés... Cela a pu nuire sur certaines fonctions. »

Certes, une actualisation peut être demandée (et donc un dédommagement obtenu) . « Mais cela arrive des mois plus tard après le travail effectué. Entretemps, les gens voient juste qu'ils gagnent moins ! » Une situation que la FES dénoncera bientôt auprès du ministre du Travail avec qui la Fédération a rendez-vous.

« À Georges Mischo et au gouvernement, il faut rappeler que l'intérim n'est pas secondaire pour assurer le bon fonctionnement de l'économie nationale, insiste Marc Lebrun. On peut donc se rapprocher de nous pour voir ce qu'il peut être fait pour aider la relance en offrant de la souplesse aux employeurs, une fiscalité peut-être différente pour celles et ceux qui acceptent -par choix ou nécessité- d'accepter une mission courte, etc. »

 

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