Belges et Allemands rechignent encore à travailler au Luxembourg
Publié
par
Patrick Jacquemot
le 08/01/2025 à 06:01
4 commentaires
Quelque chose cloche, mais quoi ? Alors que l’activité luxembourgeoise réclame toujours plus de salariés, il semble que les postes vacants ou les conditions de travail proposées ne suffisent plus à attirer des salariés venant des frontières Est et Ouest du pays. Ainsi, après une période avril-juin 2024 qui avait vu diminuer le nombre d’employés en poste au Grand-Duché mais vivant en Belgique ou en Allemagne, voilà que juillet-août et septembre a suivi la même tendance.
Ainsi, au second trimestre de l’année qui vient de s’achever, le Statec a vu baisser de -0,1% cette population active résidant du côté d’🇧🇪Arlon ou Trèves🇩🇪. Un reflux compensé, certes, par la progression du nombre de frontaliers lorrains entrés en fonction (🇫🇷+0,5%).
Aussi minime que puisse apparaître cette diminution des frontaliers wallons, sarrois ou rhénans, elle inquiète tout de même les recruteurs. En effet, ceux-ci ont déjà des difficultés à trouver dans le bassin de vie “local” l’ensemble des profils dont ils auraient besoin, alors si en plus un désamour s’installe chez ces voisins, le pire est à craindre. Là, sur 3 mois, on parle déjà de 400 salariés belges et 200 allemands de moins.
La valse des partenaires
Fin novembre, OGBL et LCGB avaient déjà manifesté pour interpeller au sujet des “désavantages” pesant sur les frontaliers. Des inconvénients (financiers ou du quotidien) qui, ajoutés les uns aux autres, peuvent effectivement freiner certain-e-s à venir travailler au Luxembourg : limite du télétravail, fiscalité plus si avantageuse ou incertaine, pénibilité des déplacements…
Régulièrement ces derniers mois, le patronat luxembourgeois s’est inquiété de cette lassitude, a pointé du doigt les dangers à ne plus être aussi attractif auprès d’une main d’œuvre de proximité. Pour l’instant sans réaction significative.
Tout juste une revendication sur la nouvelle fiscalité pesant sur les heures supplémentaires des frontaliers allemands a-t-elle été prise en compte, donnant lieu à l’attribution d’un crédit d’impôt de 700 euros. Pour le reste, on ne voit guère le Gouvernement luxembourgeois se bouger pour l’amélioration particulière du statut et des conditions d’accès à l’emploi des 228.000 frontaliers.
Il est vrai qu’autour de Luc Frieden les partenaires de négociation valsent. Toujours pas de gouvernement en Belgique en près de six mois. Quatrième Premier ministre en France depuis la nomination du nouveau gouvernement luxembourgeois. Législatives précipitées en Allemagne pour février 2025 : pas de quoi faciliter les échanges et les traités bilatéraux…
En attendant, l’économie luxembourgeoise attend une reprise de son activité 2025, et cela passera par d’indispensables embauches. Certes l’appel à une main d’œuvre originaires des pays tiers (hors UE) a été facilitée mais juste pour les métiers sous tension. Le recours aux frontaliers reste essentiel, pour ne pas dire vital. Avec Belges et Allemands dans le lot, aussi bien que les salariés venus de l’Hexagone.
Ça recrute au Luxembourg :
la preuve en rubrique EMPLOI
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iso9002
Le problème pour les belges c'est les salaires. L'inflation a été de beaucoup plus forte en Belgique qu'au Luxembourg, ce qui a fortement réduit la compétitivité des salaires luxembourgeois par rapport aux salaires belges. Pour de nombreux belges, ça ne vaut plus le coup de se déplacer alors qu'on peut avoir une meilleure qualité de vie en gagnant presque autant.
La faute aussi aux employeurs luxembourgeois qui ont trop profité de la main d'œuvre voisine afin de mettre les travailleurs en concurrence et maintenir des salaires bas : un jeune diplômé qui commence a un pouvoir d'achat fortement diminué par rapport à il y a une quinzaine d'années de cela, pendant ce temps le travailleur expérimenté n'a aucune perspective de progrès dans sa carrière au Luxembourg. Pire, il sait que s'il perd son travail il ne retrouvera jamais son ancien salaire.
Le troisième critère, c'est évidemment le télétravail qui reste inaccessible pour les frontaliers belges. On parle d'une possible amélioration des conditions pour les travailleurs français, mais rien pour les belges ni les allemands. Ce n'est absolument pas motivant alors que les travailleurs belges les plus qualifiés profitent d'un télétravail quasi illimité (lorsqu'ils y ont accès bien entendu, mais c'est assez généralisé en Belgique.. énormément plus qu'au Luxembourg en tous cas).
essai18
Personnellement, je pense que le problème est plus profond qu’il n’y paraît.Certes, il est nécessaire d’assouplir les règles concernant le télétravail, mais dans une certaine mesure, car un assouplissement excessif pourrait engendrer des dérives fiscales, tant pour les entreprises que pour les employés.
À mon sens, la Belgique a déjà consenti d'importants efforts en matière de fiscalité et de rémunération, notamment grâce à l’indexation des salaires et d’autres mécanismes. En fin de compte, la différence entre les avantages fiscaux des frontaliers et des résidents belges n’est plus aussi significative qu’elle ne l’était auparavant.
La réforme de 2017, qui a revu les règles d’assimilation, a considérablement réduit les avantages pour les non-résidents. Certains d'entre eux ont vu leur imposition augmenter de plus de 15 %.
En réalité, les efforts réalisés pour soutenir le Luxembourg semblent principalement reposer sur les épaules des non-résidents, et ce, depuis plusieurs années. À force de creuser cet écart, cela pourrait finir par se retourner contre eux.
Didier Simon
Cet exactement ça. D'ailleurs je connais plusieurs frontaliers belges qui se demandent s'ils ne vont pas faire machine arrière alors qu'il travaille depuis plus de 20 ans au Luxembourg dans le trajet deviennent pénibles et que le télétravail qu'il aurait pourtant aisément accessible n'est pas« autorisé»/ « aisément accessible». Par contre, au niveau restaurant je ne suis pas d'accord car même les semaines où on télétravail on trouve toujours le temps d'aller manger un bout ensemble à midi
sitesref
C'est très simple: la limite des jours de télétravail est contrôlée en Belgique et en Allemagne, alors qu'en France, pas du tout.Du coup, les salariés résidents français s'en donnent à coeur joie pour exploser leur plafond (qui peut les en blâmer, sincèrement ?)
Et comme le gouvernement luxembourgeois ne manifeste aucune envie de hausser ce plafond, ils ont beau jeu de prétendre qu'il est difficile de trouver des interlocuteurs dans les Etats voisins. La vérité est que les secteurs de l'immobilier et de la restauration ne veulent pas que les frontaliers travaillent davantage (mauvais pour les affaires), et comme ces secteurs ont ce gouvernement à leur botte.... Tout est dit.