Armand, frontalier au Luxembourg : « Je n’ai plus envie de travailler comme avant »
Publié
par
EddyThaux
le 05/09/2022 à 06:09
Titulaire d’un bachelor (BAC +3) en ressources humaines, il trouve un emploi en France en 2006 comme chargé de gestion des ressources humaines, dans une société de vente de vêtements. C’est un poste polyvalent qui permet entre autres, d’assister le DRH (Directeur des Ressources Humaines). Il gagne 1 100 euros net, soit un tout petit peu plus que le salaire minimum (qui était de 985 euros). Mais pour un premier poste, il se dit pourquoi pas. Très vite, entre le loyer, le crédit de sa voiture et le reste, son salaire ne lui permet pas de vivre décemment.
De la France au Luxembourg, de 1 100 euros à 1 750 euros de salaire
De nombreuses connaissances travaillent au Luxembourg, et même s’ils ne sont pas à 35 heures mais 40 heures, il se dit : « Je suis jeune, ça ne va pas me tuer de bosser 4 heures en plus par semaine, je vais tout faire pour trouver un job au Luxembourg. » Il se rend compte très vite, que même s’il a de bonnes bases en ressources humaines, il ne connait pas assez bien le code du travail luxembourgeois, ni ses spécificités. Il décide alors de se payer une formation au Luxembourg en cours du soir pour mieux connaître les spécificités du droit de travail au Grand-Duché du Luxembourg.
Aussitôt la formation finie, il envoie autant de CV qu’il peut et rapidement, une société d’assurances luxembourgeoise lui propose un poste au service des ressources humaines pour 1 750 euros net et des tickets restaurants.
Il s’y plait vraiment et s’intègre parfaitement bien. Il sort régulièrement au Luxembourg le soir, et rencontre même sa nouvelle compagne, une expatriée qui vit donc au Luxembourg. Vivant la moitié du temps en France et l’autre moitié chez sa compagne, tout se passe pour le mieux.
Le télétravail pour la première fois de sa vie
En 2020, au premier confinement, comme beaucoup, il découvre le télétravail, un peu déstabilisé. Durant les deux années de pandémie, il retourne assez peu au bureau. Et puis en juin 2022, il reçoit une circulaire l’informant de la fin du télétravail. Il passe tout le mois de juillet en présentiel, avec des jours plus durs que d’autres, surtout les jours où les bouchons sont de retour. Enfin les vacances début août, avec un certain soulagement. « Je n’étais pas parti en vacances depuis 2019 et c’était comme une sorte de libération. Je me suis posé beaucoup de questions sur ma vie, mon travail, ce rythme soutenu avec certaines semaines à 45 heures. », nous explique-t-il.
Il a repris son travail mi-août, mais il ne parvient pas à se motiver
Aujourd’hui, il est adjoint DRH.
« Je ne sais pas ce qui se passe. Je n’ai plus aucune motivation, pourtant, je n’aimerais pas avoir un autre job. Je suis conscient que je suis bien payé par rapport à la France. Je gagne 3 500 euros nets, plus les avantages comme la voiture et autres… J’ai l’impression de prendre conscience que pendant des années, je bossais comme un fou et que j’aimais ça. En tous cas, je ne me posais pas de question. C’est un peu comme si j’avais été privé de liberté et que le fait d’avoir eu deux semaines de vacances, à faire ce que je voulais, sans masque, à l’air libre… Bref, je me dis que j’étais dans un engrenage et que je pensais que c’était une vie normale. »
Sans la pandémie, Armand ne se serait sans pas remis en question
« Avant la pandémie, je me posais moins de questions. J’ai 38 ans et j’avoue que je m’en veux d’être dans cet état léthargique. Je sais que ça passera (je l’espère), mais vraiment, il s’est passé quelque chose ces trois dernières années qui marqueront ma façon de vivre et de travailler. Le boulot c’est très important mais j’ai l’impression qu’aujourd’hui il me faut aussi plus de moments pour moi et les gens qui me sont proches. »
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