Face au beaujolais nouveau, les vins luxembourgeois ne boivent pas la tasse
Publié
par
Patrick Jacquemot
le 16/11/2022 à 21:11
Au Luxembourg, le cépage gamay n’est quasiment pas répandu. Pas la peine donc d’aller chercher dans les caves de la Vallée de la Moselle un vin qui “ressemblerait” au beaujolais nouveau.
N’empêche, tradition du 3e jeudi de novembre, c’est bien à compter de ce 17 novembre que des milliers de bouteilles de « beaujolpif » vont être débouchés au Grand-Duché. Une goutte d’eau parmi les quelque 9 millions de litres partis à l’export depuis les vignes plantées entre Lyon et Macon.
Aux Domaines Vinsmoselle, le « tsunami beaujolais » ne fait plus trembler. « Après tout, nous aussi, nous sortons (et avec une semaine d’avance) des vins nouveaux. Une habitude des vins primeurs prise depuis plusieurs années », s’amuse Yves Ury, directeur commercial du principal producteur de vins et crémants luxembourgeois.
Ainsi depuis quelques jours déjà, peut-on trinquer à l’Auxerrois nouveau de la coopérative. Mais cette année, les amateurs de Pinot noir primeur resteront sur leur soif. « C’est compliqué de sortir des références en trop petite quantité alors que le beaujolais va capter la plupart des ventes sur cette période. Il faut gérer les fruits de ses vendange au mieux.»
«La véritable singularité de nos bouteilles »
Alors les Domaines feront le dos rond cette fois encore. Préférant soit laisser vieillir ce qui dort dans ses cuves, soit organiser d’autres « produits éphémères » plus dans les habitudes locales.
On parle ici du Fiederwäissen, par exemple. Le premier jus de fermentation se dégustant quelques semaines à peine après les vendanges. « Et puis maintenant va arriver Glühwein pour le temps de l’Avent. Et si la météo est avec nous, il y aura du Eiswein. Meilleur encore que des vendanges tardives», liste Yves Ury. Sans oublier les étiquettes plus vendeuses encore.
A une autre échelle, Stéphane Singery du Clos Jangli sait, lui, qu’il est difficile de s’opposer au phénomène vino-festif du beaujolais nouveau. «Mais je n’ai d’ailleurs pas envie d’aller contre. Moi comme les autres producteurs luxembourgeois devons nous convaincre que ce truc ne dure que quelques jours. Il doit bien nous en rester 360 pour démontrer la véritable singularité de nos bouteilles ».
Sur ses 9 hectares, le viticulteur installé depuis 8 ans préfère donc miser sur le bon et le bio. « Pour le beaujolais nouveau, il y a quand même plus de mauvaises années que de bonnes, non ? », lance celui dont la production se partage entre deux tiers d’effervescents et un tiers de vins tranquilles.
En fait, « comme petit », lui veut faire passer le message suivant : « Au Luxembourg, nul ne joue dans la même cour que le beaujolais nouveau. Je parle en quantité (là, c’est 14 millions de bouteilles qui sortent partout dans le monde) mais surtout en qualité. »
Une qualité que les quelque 350 vignerons du pays doivent défendre dans leurs caves et à chaque occasion où ils croisent un consommateur. « Ces vingt dernières, les professionnels du Grand-Duché ont fait des progrès terribles. Cela mérite une reconnaissance sur place, sur la Grande Région et au-delà encore. »
En attendant pour faire savoir que ses vins à lui n’ont « ni le goût de banane, ni de cerise, ni d’adjuvants chimiques », Stéphane Singery multiplie les foires et salons. Il participera même à une soirée BIO’jolais nouveau. Sans rancune pour ses collègues français, mais à la santé des vins luxembourgeois !
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