Romain Meyer s’en amuse. En interrogeant le géologue luxembourgeois sur la présence (ou non) de terres rares au pays, un sourire illumine son visage. « Bien sûr qu’il y en a ! Mais un peu seulement ». La surprise fait place à une petite désillusion. Il faut s’y faire : le Grand-Duché ne viendra pas concurrencer Chine,  Groenland, USA ou Birmanie comme extracteurs et raffineurs de ces métaux qui, aujourd’hui, se retrouvent aussi bien dans nos téléphones portables que dans les radars, les batteries des véhicules électriques ou les éclairages LED.

Mais le spécialiste du Service géologique de l’État d’expliquer : « Les terres rares ne sont, en réalité, pas si rares. On les trouve dans presque toutes les roches le plus souvent à des concentrations vraiment très faibles. Comme c’est le cas chez nous ». Des métaux rares que l’on trouve aussi, au fond des océans. Romain Meyer en avait fait le sujet de son doctorat. « Alors, désolé de le dire : au Luxembourg, il n’existe pas de gisements intéressants économiquement. »

Par contre, il y a d‘autres éléments chimiques dont l’exploitation pourrait devenir profitable. Et l’on ne parle plus du minerai de fer ou des ardoises qui ont fait la fortune du pays…  « L’Europe a dressé une liste de 34 ressources “critiques” à prospecter et, là, notre sous-sol est moins dépourvu. C’est d’autant plus important d’en trouver que l’Union sait que la dépendance à des fournisseurs étrangers fragilise nos industries, nos infrastructures », explique le chercheur.

« Du lithium, on a ! »

Des exemples ? Le cuivre est fortement demandé. Pour la tuyauterie, les fils électriques, les circuits imprimés ou les composants électroniques notamment. « Il y a un filon dans la mine de Stolzemburg. Sans doute faudrait-il voir si cela peut être utile de l’exploiter… » Même chose pour l’antimoine, dont la mine de Goesdorf regorge.

L’antimoine trouve son utilité dans les retardateurs de flamme autant que dans le stockage d’énergie ou pour les sidérurgistes cherchant à fondre des alliages résistants et durables.

Et puis, les géologues ont aussi mis en évidence des teneurs très élevées en manganèse dans les Ardennes luxembourgeoises. « Là encore, il s’agit de l’un des 34 éléments “précieux” pour notre développement et notre autonomie, s’enthousiasme le géologue. L’étendue de ce gisement dans l’Eislek n’a pas encore été mesuré, mais il est là. » Tout comme l’arsenic est présent au sud du pays dans le bassin de la Minett. Un métalloïde recherché pour la fabrication de lasers infrarouges, de panneaux solaires ou les réseaux 5G. « Les Belges exploite beaucoup cette matière et, en bon voisin du Royaume, le Grand-Duché partage la même géologie. Il se pourrait donc que cet élément chimique soit tout aussi accessible sous nos pieds… »

Au rang des ressources à ne pas négliger dans le sous-sol luxembourgeois, Romain Meyer ajoute même le lithium. « Avec les prospections actuelles pour la géothermie à profondeur moyenne, on s’est aperçu que l’eau qui sera utilisée pour cette production d’énergie géothermique est hautement minéralisée. Il serait technologiquement possible d’extraire ce lithium de ce liquide géothermal.»

Lithium que l’on retrouve aussi bien dans des réacteurs nucléaires que les batteries de nos tablettes électroniques ou utilisé pour réaliser des alliages hyper-légers pour l’aérospatial.

Conclusion de l’expert : « Pour notre développement, il faut donc continuer à chercher et prospecter des ressources naturelles au Luxembourg. Elles ne sont peut-être pas classiques mais elles pourraient devenir très précieuses économiquement. Le Luxembourg est géographiquement petit mais possède une géologie très diversifiée, ce qui est toujours très propice aux nouvelles observations inattendues ». Donc rêver d’un futur Eldorado dans les entrailles du Luxembourg n’a rien d’une utopie : la désillusion peut faire place à l’espoir.


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