Il a 38 ans aujourd’hui, père de famille rangé, un emploi dans le secteur bancaire. Bref à défaut de lui donner le Bon Dieu sans confession, nul ne pourrait dire que ce papa de 2 petits enfants a jadis connu la prison. « Alors bien sûr, pour écrire ce 1er livre P2. Un an dans les prisons luxembourgeoises, j’ai préféré prendre un pseudonyme. Histoire d’éloigner un peu ma vie d’aujourd’hui de celle d’il y a une quinzaine d’années. »

Va donc pour Richard Malpas en guise de signature. « Mais tout le reste est vrai, insiste l’auteur comme si aujourd’hui encore il devait toujours et encore témoigner de sa bonne foi. J’ai été condamné à trois ans de prison dont une année ferme que j’ai passé à Schrassig. Trafic de drogues. » La sentence est tombée, le récit peut débuter. « C’était après une jeunesse un peu compliquée… »

De son passage en cellule, il a fait 144 pages. L’homme y témoigne de sa toute petite cellule partagée à trois, des rares sorties de la journée dans les couloirs ou au dehors, des grandes douches collectives, du comportement des gardiens plutôt violents, racistes que bienveillants »), de la sur-médication qui permet à beaucoup de tenir… « Ce récit il m’a travaillé dès ma sortie. C’est là que j’ai commencé à écrire sur ce qui m’était arrivé là-bas et surtout qui j’y avais rencontré ! »

Je ne sais pas si la prison m’a sorti d’affaire mais les détenus oui !

Mais pas question pour Richard Malpas de jouer à la victime. De noircir le tableau. « La prison m’a rendu plus positif. L’enfant malheureux que j’avais été, l’ado perdu passé en pensionnats ou le jeune homme à la dérive que j’étais devenu a pris conscience qu’il y avait pire que ses petits malheurs. »

Derrière les barreaux, Richard était ainsi « le seul Luxembourgeois du bloc, à part les geôliers ! ». Une place à part qui lui a valu de venir en aide aux étrangers sans-papier qui attendaient d’être expulsés, à ses congénères qui recevaient de la Justice des documents dans une langue qu’ils ne comprenaient pas, à ceux qui avaient besoin d’une plume pour demander une assistance… Et de glisser dans un sourire : « J’étais devenu l’écrivain public, l’assistante sociale, le conseiller juridique (j’avais fait du Droit avant !). En fait, ça m’a valu de passer une année où j’ai été apprécié. »

Et, mine de rien, cette « humanité partagée » a fait grand bien à celui qui résume son passé en 3 phases : « gamin turbulent, petit délinquant, trafiquant pas terrible (…) Là-bas, j’ai été chanceux d’être aussi bien entouré et considéré. » Aboutissant à cette conclusion inattendue : « Je ne sais pas si la prison m’a sorti d’affaire, mais les détenus oui ! »

“P2…” c’est donc un récit où se côtoient une douzaine de portraits de gars croisés à Schrassig et plus jamais vus. « Mais toujours avec moi ! », témoigne Richard Malpas. Lui, depuis, a refait sa vie comme on dit. « À l’époque, quand je suis sorti il n’y avait pas vraiment d’accompagnement. Mais j’étais dans un élan positif alors je me suis pris en main. Pour en finir avec mes addictions (cannabis et alcool) et me trouver un job. »

Et devinez quoi ? Comme le système judiciaire était particulièrement peu réactif, notre homme a été recruté comme caissier dans une banque. Pas mal pour un ex-taulard fraîchement libéré. « Ils n’avaient pas eu le temps de mettre à jour mon casier judiciaire », s’amuse-t-il encore quinze ans et un livre plus tard.

 


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