L’IA joue du sécateur dans les vignes luxembourgeoises
Publié
par
Patrick Jacquemot
le 08/02/2025 à 11:02
D’accord, depuis les Romains qui l’ont introduite, la viticulture au Luxembourg a bien changé. Mais de là à passer elle aussi à l’ère du 2.0, il y avait un pas que les vignerons sont en train de franchir. Ainsi, au détour d’une information, la ministre de l’Agriculture, Martine Hansen, glissait : « Une application basée sur l’intelligence artificielle conseillant les viticulteurs sur la façon de tailler les vignes de manière optimale est sur le point d’être commercialisée ».
C’est un institut allemand qui développe actuellement ce projet, le DLR Mosel. « Il ne s’agit pas d’expliquer aux anciens ce qu’ils devraient ou ne devraient pas faire. Mais les convaincre que l’élagage via l’IA a des avantages pour eux », note le Dr Matthias Porten.
Déjà, il apparaît que l’usage de ce nouvel outil est simplissime. Il suffit de pointer l’appareil photo de son smartphone vers le pied de vigne et le viticulteur n’a plus qu’à pointer du doigt là où il voudrait sectionner. L’intelligence artificielle analyse et “corrige” si besoin.
De 2 minutes à… 1 seconde
Les informations qui ont été ingérées par l’app lui permettent de proposer une méthode de coupe dite “douce”. Une technique qui semble particulièrement appropriée non seulement pour conserver sa vigueur à la vigne, mais possiblement lui éviter certaines maladies. À l’exemple de l’Esca qui nécrose le bois.
Pour le Dr Porten, si l’app peut être utile dans l’apprentissage du métier de vigneron, elle peut aussi être utile pour la main-d’œuvre temporaire qui vient assister les producteurs de raisin au fil des saisons. « Il y a beaucoup de travailleurs venant de Pologne, Roumanie ou Moldavie parmi ces saisonniers. Leur transmettre les bonnes consignes de taille n’a rien d’évident avec la barrière de la langue. » Là, il suffit de regarder l’écran du mobile pour savoir où positionner son sécateur.
Maintenant, les scientifiques veulent passer au stade supérieur : intégrer ce savoir-faire de l’IA à des machines. Des premières expérimentations ont eu lieu déjà, et les premières remontées sont concluantes. Il faudra juste accélérer le process…
Ainsi, actuellement, le programme calcule pendant 2 minutes comment il va prendre en charge le végétal avant d’entamer la coupe. « Il faut réduire ce temps à 1 seconde. Nous y travaillons actuellement », lance avec enthousiasme Matthias Porten. Tout comme il est question de remplacer la lame par un laser pour trancher les sarments. Déjà, des vignes du Grand-Duché servent de banc d’essai…
Toujours dans le futur, les techniciens rêvent de pouvoir équiper les ouvriers agricoles évoluant entre les pieds de vigne d’un dispositif de type lampe frontale ou fixée à la poitrine. Celle-ci enverrait un signal luminant juste à l’endroit où il faudrait sectionner une branche, au centimètre près. L’idée en est à ses premiers balbutiements mais le DLR Mosel y travaille avec des spécialistes de l’Institut allemande pour l’intelligence artificielle et l’Université de Kaiserslautern.
Mais même si l’enthousiasme est là, que la collaboration avec la filière luxembourgeoise ou l‘Institut viti-vinicole du Luxembourg est au beau fixe, le dispositif est encore loin d’être suffisamment au point pour un usage professionnel. La ministre Hansen s’est un peu emballée… « Pas d’impatience, sourit le scientifique. Il faudra probablement au moins trois ans avant qu’elle ne soit prête à l’emploi». Rendez-vous pour la cuvée 2028 alors.
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