Marche arrière gouvernementale sur les Conventions collectives
Publié
par
Patrick Jacquemot
le 22/01/2025 à 09:01
Portes qui claquent, Premier ministre contraint de venir (deux fois) tenter d’apaiser les tensions, menace d’une grève générale : c’est peu dire que depuis octobre, entre le Gouvernement luxembourgeois et les deux principaux syndicats du pays, la possible révision des conditions de négociation des Conventions collectives de travail (CCT) était devenue un dossier brûlant. Explosif même…
Finalement, après trois mois d’un bras de fer, la pression syndicale de l’OGBL et du LCGB, les doutes de l’ALEBA et quelques craintes exprimées en coulisses dans la majorité CSV-DP auront eu raison de la volonté exprimée jusqu’alors d’ouvrir la capacité de convenir d’une Convention collective aux représentants du personnel “non-cartés”. À la Chambre des députés, Chrétiens sociaux et Libéraux ont ainsi voté pour une motion défendant le rôle exclusif des formations syndicales à négocier et signer pareil accord… Un retournement !
Le texte de cette motion (déposé par l’ancien ministre socialiste du Travail) a d’ailleurs été approuvé à l’unanimité des 60 députés. De gauche à droite, chacun a voulu exprimer son attachement à ce rôle prépondérant des syndicats. Et surtout voulu apaiser les débats autour de la mise à mal du dialogue social au Luxembourg. Histoire de retrouver le sens de l’accord, du consensus, de la négociation là où il semblait que le ministre du Travail Georges Mischo et le chef de gouvernement Luc Frieden voulait tenter le passage en force.
Viser les 80%
Si ce recul constitue une victoire pour le clan syndical, nul doute que la pilule sera plus difficile à avaler côté patronal. En effet, de l’UEL à la Fédil en passant par la Fédération des artisans, le camp des chefs d’entreprises avait largement fait part de son enthousiasme à ouvrir la table des négociations de Conventions collectives aux représentants élus “non-affiliés” de leur personnel.
Les arguments avancés évoquaient le fait qu’au vu des résultats des dernières élections sociales, les syndicats n’étaient plus forcément les plus représentatifs des actifs ou alors que, dans certaines entreprises, aucun syndicat national n’était représenté et pourtant appelé à discuter avec la direction de choix internes.
Mais sans doute, le Gouvernement a-t-il accepté de reculer ici pour mieux avancer au final. Il faudra en effet s‘entendre sur d’autres règles favorisant le développement des CCT au Luxembourg. L’Europe souhaite que de 59% d’actifs “couverts” par de telles conventions, le pays passe à un taux “souhaitable” de 80%.
Par ailleurs, d’autres thématiques sensibles attendent gouvernement et partenaires sociaux. Il vaut donc mieux apaiser un peu les syndicats avant d’entrer dans le dur des tractations sur le travail du dimanche, l’avenir des retraites ou encore la flexibilisation du travail sous peine de tout faire capoter d’emblée.
Volte-face ou malentendu ?
En début de semaine, le ministre du Travail luxembourgeois pointé du doigt dans les reproches syndicaux s’était exprimé sur la question des CCT. Et d’évoquer au micro de Radio 100,7 un simple « malentendu ». Une confusion qu’il aura fallu un trimestre donc pour effacer…
Toujours est-il qu’en votant, ce 21 janvier, la motion évoquant le « rôle exclusif » des syndicats dans la négociation des CCT, les parlementaires CSV et DP ont effectué un virage à 180° par rapport à leur position de… fin octobre 2024! Le même texte (porté par l’écologiste Djuna Bernard) avait alors été rejeté par 100% des 35 députés de la majorité Frieden-Bettel. Qui a dit qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ?
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