« Quelle aventure ! » Andreas Hein, professeur à l’Université du Luxembourg, n’en revient toujours pas. Avec des confrères et des étudiants, ils ont réussi « sans expérience préalable dans le domaine » à concevoir et réaliser un satellite. Certes tout petit -de la taille d’un Rubik’s Cube, 5 x 5 x 5 cm- mais un concentré de haute-technologie. Un nano-engin qui fait la (grande) fierté de la SnT, la “forge technologique” de l’Uni au Kirchberg.

Ainsi est né Poquito. Un appareil qui marquera l’histoire du Grand-Duché, comme à jamais le 1er satellite issue de l’université luxembourgeoise parti vers les étoiles. Certes, par deux fois déjà, des expérimentations initiées par l’Université avaient pris le chemin de l’espace mais c’était toujours à bord d’autres véhicules. Cette fois, c’est un satellite complet qui est fourni pour une mission.

Si l’équipe engagée dans ce projet a fait le choix de la miniaturisation, c’est autant par défi technologique que… financier. Dans l’industrie spatiale, tout doit devenir plus petit, plus léger car expédier un objet de dimensions et poids réduits en orbite devient moins coûteux. Et une facture plus basse permet à de nouveaux acteurs, comme l’Uni, de s’impliquer dans la recherche spatiale.

Combien a coûté Poquito ? Andreas Hein n’avance pas de facture, juste une estimation : le prix est « comparable à celui d’une voiture un peu plus chère» (développement et voyage à bord d’un lanceur Falcon 9 inclus). Ce n’est donc pas une voiture d’occasion, mais ce n’est pas non plus une Rolls Royce coûteuse…

Pour les chercheurs, Poquito va permettre d’étudier une nouvelle méthode de communication utilisant la lumière. Ainsi, l’appareil se compose de deux parties qui sont connectées mais dont la technologie n’est pas connectée. Du coup, des impulsions lumineuses provenant de LED vont assurer les échanges de données.

« Cette technologie a l’avantage notamment de ne pas être captable par des “oreilles indiscrètes”, à la différence d’un signal radio par exemple », explique Vittorio Franzese, post-doctorant à l’Université et chef d’équipe du projet.

Second objectif de recherche : le système de stabilisation du satellite. Car sitôt avoir été abandonné dans l’espace, l’objet commencera à chanceler (faute de propulseurs conventionnels). Un système interne destiné à aligner le satellite sur le champ magnétique terrestre a donc été mis au point. On saura bientôt s’il fonctionne…

Bientôt car c’est ce mardi 14 janvier entre 19h49 et 20h46 (heure luxembourgeoise) que Poquito devrait quitter sa base de lancement, en Californie. Ensuite, il tournera au-dessus du globe sur une orbite très basse ( à “seulement” 525 km d’altitude).

« À cette hauteur, il y a encore des molécules d’air qui vont le ralentir lentement mais sûrement pour que notre satellite finisse par rentrer dans l’atmosphère dans environ trois ans »,  estiment Vittorio Franzese et Andreas Hein. Pas question donc que, même “nain”, Poquito devienne un débri spatial comme il en existent déjà tant.

Petit et… speedy

Généralement, il faut près de 10 ans pour acquérir un savoir-faire spatial. Dans le cas du projet porté par l’Uni luxembourgeoise, deux ans auront suffi ! C’est dire l’engagement des chercheurs et leurs étudiants entre la 1ère phase de conception du projet (fin 2023) et le lancement de ce début 2025.

Cette brièveté a permis à plusieurs étudiants d’accompagner le projet de bout en bout et d’affiner leurs compétences (mécanique, électronique, programmation…). Une expérience qui sera certainement payant sur leur CV s’ils veulent passer de l’Université à l’industrie spatiale privée.

Pour l’Université de Luxembourg, ce projet signifie beaucoup. Déjà par la foule d’articles et de publications qu’il va susciter mais aussi comme pas de géant dans l’industrie spatiale. Poquito prouvant la capacité de lancer un satellite, tant en termes de savoir-faire technique que d’efforts administratifs.

En effet, avant son décollage, le satellite a dû obtenir une galaxie d’approbations, subir des tests de résistance « atroces », avoir le feu vert de la société d’Elon Musk, Space X, qui va le placer en orbite, etc. Allez, on croise les doigts maintenant !