Avant la réforme des retraites, faut qu’on parle !
Publié
par
Patrick Jacquemot
le 04/10/2024 à 17:10
Quand la montagne est haute, autant partir tôt. Aussi, moins d’un an après sa mise en place le gouvernement Frieden-Bettel se lance à l’assaut du dossier le plus compliqué qu’il entend gérer : ajuster le régime des pensions luxembourgeois. Une escalade socialement sensible, politiquement casse-gueule mais que la majorité CSV-DP s’est fixée comme “problème” à solutionner d’ici 2028. Et la périlleuse ascension débutera ce lundi 7 octobre !
Le Premier ministre avait prévenu : pas question de décider d’une voie sans en avoir discuté auparavant avec le plus grand nombre. Syndicats, organisations patronales, associations et même particuliers, résidents ou frontaliers : la parole sera donnée à tous, « afin de parvenir à un consensus », a répété la ministre de la Sécurité sociale Martine Deprez, première de cordée de cette énième consultation sur le sujet…
Pour la ministre, il est clair qu’il y a urgence à agir. « Le taux de cotisation actuel de 24% sera insuffisant pour couvrir le montant des pensions annuelles dès 2027 », garde-t-elle comme boussole. Mais l’analyse est loin d’être partagée par tous les acteurs sociaux dans le pays. Premier caillou donc dans la chaussure gouvernementale avant même d’évoquer le chemin à emprunter pour assurer la viabilité à long terme du système.
Des pistes
Devra-t-on allonger le délai minimum de 120 mois travaillés au Luxembourg pour bénéficier, demain, d’une pension vieillesse ? Revoir l’âge d’accès à ce droit ? Faudra-t-il ne plus indexer les retraites sur l’inflation ou à les augmenter chaque 1er janvier ? Pourquoi ne pas imaginer des montants versés plus élevés pour les nouvelles générations que l’âge amène à quitter la vie active ? Les indépendants ou salariés et fonctionnaires devront-ils cotiser plus que les -respectivement- 16 et 8% de leur revenu pour alimenter les caisses de la Caisse nationale d’assurance pension (CNAP) ? Et quid de la part patronale demandée ?
Tous ces scénarios peuvent être posés sur la table, assure le Premier ministre. Sachant qu’actuellement, près de 150.000 “seniors” perçoivent chaque mois une retraite luxembourgeoise, au pays ou à l’étranger. Et cela notamment grâce aux cotisations de 500.000 employés. En 2070, ce sont 605.000 hommes et femmes qui seraient en âge de demander à toucher leur pension…
Douze ans après la dernière grande réforme, voilà en tous le dialogue (ré)ouvert. Avec les partenaires sociaux et d’autres intervenants dans la vie publique comme premiers interlocuteurs. Au total, 15 organisations se succèderont devant la ministre d’abord. LCGB et OGBL (qui ont déjà fait savoir leur opposition), Union des entreprises, CGFP, ACEL pour la voix des étudiants, Conférence nationale des élèves, Fondation IDEA, ACA, Conseil supérieur pour un développement durable (Nohaltegkeetsrot), Centrale paysanne, Conseil national des finances publiques, etc.
En octobre et novembre, la “société civile” pourra s’exprimer sur la plateforme spécialement mise en ligne et baptisée Schwätz mat! (trad: parle-moi). Chacun étant libre, dit la ministre, de donner son avis sur le système actuel et de proposer des pistes pour l’avenir.
Enfin, pour début 2025, la consultation prendra la forme d’un questionnaire diffusé à large échelle par le ministère de la Sécurité sociale. À qui, comment, quel poids auront les réponses ? Martine Delprez n’a pas encore éclairci la chose… Ne lui restera alors plus qu’à tendre à l’avis de “groupes d’experts”, derniers à se faire entendre dans ce débat.
Enfin derniers pas tout à fait, car il faudra bien faire passer l’éventuelle réforme devant la Chambre des députés. Et si la majorité compte sur le soutien de ses 35 parlementaires, pas sûr que les 25 autres n’aient pas un mot à dire. Voire quelques invectives à lancer haut et fort.
En tout cas, OGBL et LCGB ont déjà décidé de hausser le ton d’entrée. Lundi, juste pour l’ouverture de la phase de consultation, les deux syndicats ont programmé une conférence de presse commune. Sujet unique : “revendications quant à la pérennisation du régime général d’assurance pension”. En avant, marche !
Pour laisser un commentaire veuillez vous connecter ou inscrivez-vous.