Ils sont agent de sécurité ou de maintenance, secrétaire commerciale, technicien d’environnement, éducatrice, sage-femme… Ce sont des frontaliers belges ou français qui font des centaines de kilomètres sur la route pour se rendre sur leur lieu de travail au Grand-Duché.

Fier d’avoir une voiture de fonction

Les plus proches font en moyenne plus de 100 kilomètres par jour, les plus éloignés comme Sébastien, responsable d’études roule plus de 250 bornes. Lui, a la particularité d’avoir une voiture de fonction suite à une promotion.

Raphaël, technicien d’environnement vit en France. Avec 96 kilomètres au compteur par jour, il se dit, lui aussi chanceux puisqu’il a une voiture de fonction, une citadine Mercedes Class A et une carte essence : « Sans ces avantages en nature, note-t-il, je ne serais pas venu au Luxembourg ».

Les employeurs au Luxembourg ne cèdent pas si facilement sur le prêt de véhicule aux salariés qui vivent loin du Grand-Duché, ni d’ailleurs sur le remboursement des frais de stationnement. C’est sous certaines conditions : « Mon entreprise ne prend pas en charge mes frais de déplacement. C’est à ma charge. Je le savais au moment de mon embauche » tempère Suzy, frontalière française, secrétaire médicale depuis deux ans et demi. Elle effectue 200 kilomètres aller-retour par jour.

Les allocations et le salaire, ça fait tout

Ont-ils des points communs ? Tous avouent venir en priorité pour le salaire, plus élevé que dans leur pays d’origine : « Mon salaire est deux fois supérieurs à la France et je bénéficie des allocations familiales pour quatre enfants. Comme je suis maman célibataire, c’était le seul moyen pour moi d’avoir une vie décente. En France avec quatre enfants le mieux et de vivre aux crochets de la société.  Mon niveau de vie a quasiment triplé » se félicite Suzy.

Indéniablement, pour les frontaliers qui sont parents, les avantages de la Caisse nationale des prestations familiales au Luxembourg doublent leur motivation : « De tels avantages n’existent qu’au Luxembourg. Le complément des allocations familiales, c’est plutôt sympa » explique Laurent, agent de maintenance.

Quoique, de nombreux salariés reconnaissent aussi que le salaire ne fait pas tout : « Faire des kilomètres pour s’ennuyer dans un poste, il faut être un peu fou » reconnaît Raphaël. La cadre de travail est aussi un moteur « pour avaler des kilomètres » par an : « Le Luxembourg est un pays dynamique et multiculturel avec des installations haut de gamme en perpétuel développement…. Il se situe au milieu de tout avec des axes autoroutiers menant vers l’Allemagne, la France et la Belgique. C’est un exemple de vivre et de travailler ensemble » rappelle-t-il.

Frontaliers éloignés, frontaliers retardés ?

Frontaliers éloignés, frontaliers plus en retard. C’est, selon eux, une fausse idée, bien au contraire : « Je ne suis jamais arrivé en retard à mon travail. Certains de mes collègues habitent à la frontière et en empruntant les petites routes, ils mettent parfois plus de temps. Une fois que je suis sur l’autoroute, c’est tout droit » s’amuse Sébastien.

Ce jeune homme de 26 ans est responsable d’études depuis 4 ans à Schifflange. Il fait 250 kilomètres tous les jours puisqu’il vit à Nancy. Lors de son entretien d’embauche, il note que le sujet de la distance entre son lieu de résidence et son travail a été abordé par son employeur : « Dans mon cas, mon employeur m’a ouvertement demandé si je n’allais pas m’user à faire tous ces kilomètres par semaine. En 4 ans de route, j’ai tout mis en place pour satisfaire la confiance de mon patron. C’est du gagnant-gagnant » se souvient-il.

Et le budget…

Pour faire des kilomètres, il faut une bonne voiture si possible un diesel. Une option choisie par l’ensemble de ces frontaliers pour des raisons financières, tout simplement. Sébastien de Nancy dépense 350 euros de diesel par mois. Il évoque un avantage supplémentaire grâce à sa classe d’imposition qui lui permet de bénéficier d’une aide gouvernementale pour son transport d’un montant d’environ 215 euros : « Mes allers-retours au Luxembourg me reviennent à 135 euros d’essence » .

Suzy, a calculé que sa note de carburant lui coûtait 300 euros : « Une somme à prendre en compte au moment de la négociation de ton salaire » confirme-t-elle.

Sébastien, frontalier français, est agent de sécurité. Il fait près de 180 km aller-retour avec sa Ford Kuga diesel et fait un plein de 250 euros par mois.

Faire des bornes, oui, mais pas à n’importe quel prix ! Et justement le faible prix du carburant au Luxembourg est un atout pour ces frontaliers « au long cours ».

Se rapprocher du Luxembourg, pas vraiment

Il est temps de l’avouer. Ils ont eu tous plus ou moins eu l’envie, un jour, de s’installer au Luxembourg. Mais voilà, acheter un bien dans le pays, c’est impossible, selon eux : « D’ailleurs, je ne sais pas si le pays accepterait de voir s’installer sur leur territoire, tous ces milliers de travailleurs. Les prix élevés de l’immobilier, c’est dissuasif » remarque Thibaut, 25 ans, frontalier belge, fier de ne faire que 60 km aller-retour pour se rendre sur son lieu de travail.

Se rapprocheront-ils un jour de la frontière ? Certains y songent. D’autres, non : « Quand tu vois les maires des communes frontalières réclamaient sans cesse de l’argent au Luxembourg en compensation de l’accueil des familles de salariés. Je me dis parfois qu’être loin du Luxembourg, c’est être aussi loin des guerres de clochers » précise Séverine, 48 ans, sage femme, frontalière française. Avec des horaires décalés, elle parcourt tous les jours 150 kilomètres : « Je fais des bornes et je me plains pas. Ces quelques heures passées dans ma voiture me permettent de décompresser, de penser à autre chose. Quand j’arrive chez moi, le travail est derrière moi ».

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Lire Ignacio, frontalier : “Je suis un travailleur pauvre au Luxembourg “